19/12/2025
Abou Condé, le frère aîné d’Adamo qui a été tué par balles dimanche, est arrivé en urgence de Paris à Namur. Consultant en cybersécurité pour des produits Microsoft à Paris, il veut que justice soit faite. « Mon frère a été abattu comme un animal par la police, c’était de l’acharnement », déclare-t-il, accablé.
Comment avez-vous appris le décès d’Adamo, votre petit frère tué par balles par la police de Namur dimanche soir ?
Plusieurs personnes ont contacté des membres de ma famille pour nous dire que mon petit frère était décédé. J’ai également été contacté personnellement, notamment via les réseaux sociaux ou par des connaissances qui m’ont identifié sur les vidéos qui circulent, où l’on voit mon frère être tabassé par des policiers. Officiellement, nous n’avons appris la nouvelle que le lendemain. Dans les premières heures, j’ai essayé d’en savoir plus. J’ai aussi réservé un TGV de Paris à Namur. Je voulais venir sur place et comprendre ce qu’il s’était passé. Je suis à Namur depuis mardi.
Vous ne voyiez plus beaucoup votre frère ces derniers temps, c’est exact ?
Oui. Cela fait 20 ans que j’ai quitté la Guinée. Je suis parti faire mes études en informatique au Ghana, puis des spécialisations en Inde. À mon retour au Ghana, j’ai été recruté par une société française. Je travaille aujourd’hui comme consultant senior en cybersécurité pour des produits Microsoft. Depuis 2021, je vis à Paris. Je voyage beaucoup entre la France et les États-Unis. J’ai donc un peu perdu de vue mon frère ces dernières années. En 2021, il était toutefois passé en France près de moi. Il allait bien. Il m’a ensuite dit qu’il préférait s’installer en Belgique, où il avait de nombreuses connaissances. Après, j’étais trop pris dans mon travail.
Que pouvez-vous dire sur votre frère ?
Mon petit frère, dont je suis l’aîné de six ans, était une personne bien éduquée. Ce n’était ni un délinquant ni un criminel, et ce n’était pas non plus un malade mental comme on le décrit. (NDLR : des rapports d’experts ont toutefois souligné que la victime souffrait de troubles mentaux dans le cadre d’un autre dossier pour lequel il a été jugé en 2023 et dont un internement était prévu.) Vous savez, nous sommes une grande fratrie dans notre famille et nous avons reçu une très bonne éducation de la part de nos parents. Adamo était très respectueux. Certes, je ne l’ai plus beaucoup vu ces quatre dernières années, mais cela ne change rien à ce qu’il était.
Que comptez-vous faire suite au décès violent de votre frère ?
Je suis venu à Namur pour comprendre ce qu’il s’est passé. Je veux me battre pour que toute la lumière soit faite sur cette affaire. Mon petit frère a été assassiné sauvagement par la police. Il a été touché par trois balles, tirées par trois policiers différents. Pourquoi autant de tirs ? Pourquoi après avoir reçu ces trois balles ? Pourquoi une policière s’est-elle encore acharnée sur lui en lui donnant des coups au visage ? Cette dernière scène que l’on voit sur de nombreuses vidéos me hante. Je n’aurais jamais cru que mon petit frère serait abattu comme un animal par la police belge. Ce genre d’histoires, et surtout la manière dont cela s’est déroulé, on les associe plutôt aux États-Unis. Cela me fait très mal de voir à quel point ils se sont acharnés sur lui.
Avez-vous déjà eu un contact avec la police ?
La police m’a contacté ce mercredi pour savoir si je souhaitais faire un dernier adieu à Adamo. Je n’ai pas très bien compris, car cet adieu n’aura pas lieu en Belgique. Avec ma famille, nous voulons que le corps soit rapatrié et inhumé en Guinée. Le dernier hommage se déroulera dans notre pays. Mais nous ne sommes pas pressés. Pour l’instant, je laisse les experts faire leur travail. Le corps est toujours aux pompes funèbres Fontaine à Charleroi. Je ne sais pas si l’autopsie est terminée. Mais j’espère que toutes les analyses ont été réalisées méticuleusement. J’espère qu’on me dira l’emplacement exact des impacts de balles.
Jusqu’à quand restez-vous en Belgique ?
Je vais rester au moins jusqu’à la manifestation prévue samedi, près des lieux du drame. Ce sera très difficile. Ensuite, tout dépendra du moment où nous pourrons récupérer le corps. Je suis freelance pour mon entreprise, ce qui me permet de prendre quelques jours de congé. Nous allons suivre l’évolution du dossier de près et nous ne lâcherons rien. Mon frère ne méritait pas tout cela.
Source : sudinfo.be
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