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Présidentielle en Guinée : la grande Mamaya des promesses vides est ouverte

9/11/2025

 
La Cour suprême vient de publier sa liste provisoire. Sur cinquante et un prétendants, neuf seulement ont franchi la première barrière. Les autres disposent de soixante-douze heures pour contester leur sort. Mais, au fond, qu’importe le nombre ? Le constat reste inchangé. Nous avons des candidats, mais toujours pas de programmes. Le spectacle continue, et la scène des idées demeure désespérément vide.
Les voilà donc, nos neuf, alignés comme à la grande Mamaya. Ils sillonnent le pays, font danser les foules, agitent des drapeaux. Promesses grandiloquentes, français de cuisine ou dialecte enjôleur, tout y passe. Mais les faire s’asseoir autour d’une table pour qu’ils se regardent dans le blanc des yeux et parlent, vraiment ? Pour qu’ils exposent leurs idées, qu’ils se les jettent à la figure, qu’ils se crépissent le museau de chiffres et de projets ? Impossible. La campagne n’a même pas commencé que la comédie bat déjà son plein.
On nous dit que c’est la peur du français qui les retient. Allons donc. La vraie langue qu’ils ne maîtrisent pas, ce n’est pas celle de Molière, mais celle de la confrontation démocratique. La seule langue qu’ils parlent couramment, c’est celle de la démagogie. Peur des mots ? Oui, mais seulement de ceux qui exigent des comptes. Quant à la lumière crue des projecteurs, elle révélerait trop bien le vide sidéral de leurs discours, ou pire, l’épaisseur de leurs contradictions.
Notre démocratie est devenue un théâtre de marionnettes où les fils sont tirés par l’argent sale et les vieux démons ethniques. Chaque candidat danse la même rengaine : « Moi président, je vais… » Complétez par la promesse la plus grotesque qui vous passe par la tête, vous ne serez pas loin de la vérité. Autoroutes, merveilles, cathédrales… alors qu’un simple nid-de-poule reste un Everest.
Ici, le pouvoir ne se débat pas, il se conquiert. Il ne se gagne pas à coups d’arguments, mais au pas de Mamaya sur des pistes poussiéreuses, à coups de foule, à coups de poing sur la table, à coups de …enfin, vous m’avez compris ! Le débat, c’est pour les nations qui croient encore que la raison peut l’emporter sur la force. Chez nous, héritiers des rois et des empires, on n’acclame ou on ne pourfend le prétendant au trône qu’après coup.
Le futur élu, lui, n’a plus besoin de convaincre. Il règne déjà. Il distribue le silence avec la même assurance que ses discours. Quel courage faut-il pour affronter ses concurrents quand on détient les clés, les coffres et les caméras ? On lui demanderait presque, par décence, de feindre la démocratie. Mais même le simulacre semble au-dessus de ses ambitions.
Les autres dansent, agitent des slogans, promettent un avenir qu’ils savent ne pas incarner. À les voir s’agiter sans conviction, on devine qu’ils connaissent déjà l’issue. Le coup K.O. est une vieille habitude de notre vie politique, et personne n’est dupe. Chacun son rôle, chacun son calcul. On investit une caution pour négocier un strapontin. On se rêve ministre, on finit conseiller. La politique est devenue commerce, et l’État, un supermarché.
La seule dialectique qu’ils comprennent, c’est celle du ventre : qui a mangé, qui n’a pas mangé, qui va manger. Le reste - programmes, projets, visions - n’est que bruit de fond. Docteurs en économie de la corruption, bègues en grammaire du développement : voilà notre diplôme national.
Sur les places publiques, ils dansent au rythme des tam-tams qui couvrent le silence assourdissant de leurs idées. Le rôle du chef, entouré de griots, leur sied mieux que celui du serviteur public tenu de rendre des comptes. Et pour faire oublier l’absence de vision, ils organisent des tournois de football, comme si les cris des supporters pouvaient étouffer les questions du peuple. Un meeting, c’est une cour. Un débat, c’est un tribunal. Ils ont choisi leur camp.
Et le peuple dans tout cela ? Il regarde le spectacle. Berné par cette comédie du pouvoir qui se rejoue à chaque élection sans jamais changer d’acteurs, il applaudit, il espère, il subit. On l’abreuve de tee-shirts et de slogans, alors qu’on lui refuse le seul vrai spectacle qui vaille : celui des idées qui s’entrechoquent.
J’ose encore espérer. J’attends le jour où nos prétendants au trône accepteront enfin le seul duel qui vaille : un vrai débat, sans filet, sans langue de bois. Pas nécessairement dans ce français de cour qui sonne faux, mais dans la verdeur du soussou, dans la sagesse du maninka, dans la poésie du pulaar, dans la mélodie des langues forestières. Qu’ils s’expliquent, qu’ils s’opposent, qu’ils s’étripent même. Avec des idées, avec du courage.
Si l’on parlait enfin de ce qui fâche ? De cette route qui s’effrite avant même d’être inaugurée, de cette électricité qui clignote comme un avertissement, de ces hôpitaux où l’on meurt faute de soins et de ces écoles où l’on apprend à survivre plutôt qu’à penser. La politique ne devrait pas être un jeu de dupes, mais un acte de responsabilité. Chaque promesse non tenue est une plaie ouverte sur le corps du pays.
Et la jeunesse ? Celle qui se lève chaque matin avec la certitude que demain sera pire qu’aujourd’hui. Elle quitte les villages, fuit les villes, se vend à l’étranger, pleure en silence, abandonnée par ceux qui prétendent gouverner. Quand nos leaders font la fête au sommet, elle creuse, trime, espère, désespère. La politique n’est pas un spectacle pour endormir les foules : c’est la chance de changer un destin collectif.
À vous, messieurs et mesdames les candidats, je pose cette question : que ferez-vous quand le dernier nid-de-poule aura avalé le dernier franc du contribuable ? Quand les jeunes auront déserté les écoles et les villages, et qu’on ne saura plus distinguer un hôpital d’une ruine ? Vos slogans, vos tee-shirts, vos tournois de football suffiront-ils à cacher l’échec de l’État ? Ou oserez-vous enfin affronter la réalité et parler vrai ?
Maintenant que les noms sont connus, le vrai travail devrait commencer. La balle est dans le camp des candidats. Qu’ils cessent de danser et qu’ils se mettent enfin à débattre. Je repose la question : que celui qui a un programme lève la main. Mais cette fois, sans chorégraphie, sans griots, sans tam-tams. Juste la main. Juste les idées.
Comment sort-on un pays de la misère quand la corruption y est un sport national ? Comment soigne-t-on des hôpitaux sans médecins, des écoles sans maîtres, des villages sans routes ? Que fait-on d’une jeunesse qui rêve d’ailleurs parce qu’elle n’a plus foi en demain ? Comment rend-on à l’État son autorité sans lui rendre son arrogance ? Comment parle-t-on d’unité nationale quand la politique divise jusque dans les familles ? Voilà les vraies questions. Celles qui attendent des réponses, pas des refrains. Celles qui ne se règlent pas à coups de slogans, mais à coups d’idées.
Peut-être alors, si quelqu’un ose y répondre sans tambours ni trompettes, nous pourrons croire, une fois encore, que la Guinée a un avenir.
En Guinée, le silence tue plus que la faim ; que ceux qui ont des idées parlent enfin, ou que la poussière des promesses recouvre à jamais nos rêves.
Ousmane Boh KABA

 

 
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