1/10/2025
Adresse à la Nation à l’occasion du 67e anniversaire de l’Indépendance
Guinéennes, Guinéens,
Chers compatriotes,
C’est avec un cœur plein de chagrin mais aussi avec un sens aigu de responsabilité que je m’adresse à vous en ce jour mémorable où notre nation commémore le 67e anniversaire de son accession à l’indépendance.
En ce jour de mémoire et de fierté, nous devons nous rappeler d’où nous venons, où nous étions, et où nous allons.
Avant 2011, notre pays sortait de décennies d’instabilité et de fragilité. Les institutions étaient minées par la corruption, les services sociaux délabrés, l’économie en panne, les routes impraticables. L’électricité était inexistante, l’agriculture abandonnée, la jeunesse condamnée au chômage ou à l’exil. La Guinée vivait dans une précarité et une incertitude qui empêchaient tout espoir collectif.
En 2011, lorsque vous m’avez confié la direction du pays, j’ai pris la mesure de cette responsabilité historique. Ensemble, malgré les difficultés, nous avons travaillé à reconstruire notre pays et à bâtir un l’État.
Dans le domaine de l’Énergie : avec Kaléta, Souapiti et d’autres projets, nous avons multiplié par trois la capacité énergétique nationale, donnant espoir d’une autosuffisance et d’une exportation régionale. Le barrage de d’Amaria était en cours de construction. L’interconnexion de la région forestière avec la Côte d’Ivoire était déjà acquise. Celles du Libéria, de la Sierra Leone ainsi que celle du Mali étaient en cours avec en perspectives les extension et les constructions d’autres barrages énergétique pour couvrir l’ensemble du territoire national.
Dans le domaine des infrastructures : nous avons construit des milliers de kilomètres de routes bitumées dans tout le pays, des ponts et aménagements ont été réalisés pour relier les régions entre elles, désenclavant ainsi nos territoires et modernisant nos villes de l’intérieur. Plusieurs autres grands projets étaient en cours dans presque tout le pays.
Dans le secteur agricole : nous avons engagé une modernisation pour renforcer la sécurité alimentaire et soutenir nos paysans pays par la mise à disposition d’intrants agricoles dans toutes les localités de production. Cela a permis à notre pays de faire des exportations et réduire considérablement les importations alimentaires.
Dans les secteurs de la Santé et de l’éducation : de nouveaux hôpitaux ont été construits, rénovés et équipés, des centres de santé et des postes de santé dans toutes les localités ont vu le jour. Pour préparer l’avenir de notre jeunesse , des écoles, des universités ont été construites, étendues ou encore modernisées pour préparer l’avenir de notre jeunesse. Mais aussi et surtout, les salaires des enseignants ont été augmentés.
Dans les Mines : nous avons lancé des projets structurants, négocié pour plus de valeur ajoutée locale et posé les bases d’une meilleure transparence des projets miniers de bauxite à Boké et du fer de Simandou. Une mine précieuse pour le pays qui avait été bradée aux étrangers et que nous avons ramenée dans le giron de la guinée au prix de nombreux sacrifices.
Mise en place de l’Agence Nationale du Financement des Collectivité (ANAFIC) : il s’agissait d’un volonté innovatrice du développement à la base . Nous avions décidé d’affecter 15% des recettes minières au fonds du développement local (FDL) pour doter les communes rurales des infrastructures de base. Ainsi, au titre des années 2019 et 2020, cette agence a reçu un budget de GNF 518 milliards et a construit 799 infrastructures dans les 344 CRD. Ces infrastructures concernaient les écoles, centres de santé, marchés, maisons des jeunes, blocs administratifs, etc. La vision derrière de cette politique, était le partage du fruit de la croissance au bénéfice de la population en vue de réduire drastiquement le taux de la pauvreté.
Au niveau de la Diplomatie : la Guinée a retrouvé une place de choix en Afrique et dans le monde, respectée pour son indépendance et ses partenariats équilibrés.
Ces réalisations n’étaient qu’un début. Elles montraient qu’avec une vision, la Guinée pouvait redevenir un acteur majeur sur la scène africaine et internationale.
Tous ces efforts ont été faits dans un contexte politique émaillé de plusieurs manifestations politiques qui ont malheureusement enregistré des victimes dans nos familles. Je voudrais, encore une nouvelle fois, adresser mes condoléances à leurs familles, prier pour le repose de leurs âmes et demander pardon au nom de l’Etat Guinéen.
A côté de ces acquis et d’autres, je reconnais qu’il y a eu des erreurs et des manquements que je m’apprêtais à corriger afin d’amorcer un vaste programme de développement qui bénéficiait du soutien et de l’accompagnement de plusieurs partenaires stratégiques à travers le monde.
Hélas, le 5 septembre 2021, ce chemin a été brisé. Au nom de promesses de justice et de refondation, un groupe de bandits a manipulé nos enfants pour prendre en otage notre pays en versant le sang de beaucoup innocents qui étaient au service de la République.
Depuis maintenant quatre ans, la situation de notre pays est plus que dramatique. La démocratie a été enterrée, les institutions confisquées.
Les droits humains sont bafoués avec des arrestations, des détentions arbitraires, des enlèvements brutaux et disparitions forcées. A ces violences s’ajoutent une justice aux ordres, la peur et la teneur avec l’interdiction de toute contestation. La corruption et l’enrichissement illicite, au détriment des citoyens, ont pris une ampleur dépassant tout entendement. La pauvreté et le chômage se sont aggravés, les populations vivent dans le désespoir.
Aucun projet majeur nouveau n’a vu le jour. Les grands chantiers que nous avions lancés ont été désorientés et désarticulés pour servir à des intérêts mafieux au mépris de l’intérêt général. Aucun investissement structurant n’a été entrepris. La Guinée est isolée diplomatiquement, privée d’opportunités et de crédibilité.
En lieu et place de la refondation annoncée, nous vivons la désolation et la peur. Mais, je vous le dis avec la clarté et détermination : la Guinée n’appartient à personne. La Guinée appartient à son peuple. Ce peuple a le droit inaliénable de choisir ses dirigeants, de protéger ses libertés, de bâtir sa prospérité.
Notre chemin vers la restauration de la légitimité passe par le rassemblement. L’unité est notre force. Nous devons dépasser les divisions ethniques ou partisanes.
J’entends et je comprends la colère du peuple. Mais je suis convaincu que la voie la plus durable est celle qui replace la Guinée dans le cadre du droit, de la légitimité et de la dignité pour tous.
À ceux qui ont perdu un proche, à ceux qui souffrent, à ceux qui observent depuis l’exil, je promets ceci : si Dieu le veut, avec la mobilisation de tous, nous allons libérer notre pays des mains de ce groupe de criminels pour redonner au peuple toute sa dignité, sa liberté et sa pleine souveraineté.
En ce 2 octobre, jour sacré de notre indépendance, souvenons-nous : en 1958, nos aînés ont su dire « NON » à la domination. Aujourd’hui, nous devons dire non à cette junte barbare, non au kidnappings et oui à la démocratie, au rétablissement de l’ordre constitutionnel civil, à la réconciliation et à l’unité nationale.
La Guinée a souffert, mais la Guinée n’est pas vaincue. Notre drapeau flottera toujours comme symbole de courage, de richesse et d’espérance.
Vive la Guinée libre,
Vive la République,
Vive notre indépendance !
Pr Alpha CONDE
Président de la République |