Banniere Guicopres janvier 2019

ACTUALITES

Libre opinion : Mamadi Doumbouya est juridiquement inéligible à la prochaine élection présidentielle (Par Guillaume BANGOURA)

31/8/2025

  Mamadi Doumbouya est juridiquement inéligible à la prochaine élection présidentielle,
L’éventuelle adoption du projet de Constitution ne lève pas cette inéligibilité,

Souffler le chaud et le froid n'est pas chose aisée.
Rédiger une Constitution qui répond aux critères d'un véritable texte fondamental tout en voulant satisfaire les demandes d'absolution de tous les péchés mignons formulées par le chef tout puissant d’une junte militaire est une tâche encore plus ardue à accomplir.

Pour preuve, le projet de Constitution que les autorités de la transition ont taillé à la mesure du costume du président de la transition, le général Mamadi Doumbouya, pour lui permettre de se maintenir et légitimer son pouvoir, contient malencontreusement des dispositions qui font toujours obstacle, juridiquement, à son éventuelle candidature aux élections de fin de transition.

I. La gênante Charte de la transition, répudiée par le projet de Constitution

A. La rupture du serment (et des engagements solennels) : le délit de parjure

La Charte de la transition du 27 septembre 2021, octroyée en personne par Mamadi Doumbouya aux Guinéens, sans prendre en compte les propositions formulées par les forces vives de la Nation, prévoit dans ses articles 46, 55 et 65 l’inéligibilité des autorités de la transition aux compétitions électorales de fin de transition.

L'esprit qui se dégage de ces dispositions est simple : favoriser la tenue d’élections libres, transparentes et justes, conduites par des organes électoraux indépendants et impartiaux, seule condition permettant de garantir un retour effectif à l’ordre constitutionnel sans confiscation du pouvoir par les maîtres actuels du pays.

Or, la perspective d’une participation des autorités de la transition aux futures élections qu’elles organiseraient elles-mêmes les placeraient en position de juge et partie ou d’arbitre et de joueur, dans la mesure où elles ont la mainmise sur l’administration, bénéficie d’un rapport hiérarchique et de subordination à l’égard de tous les organes intervenant dans l’organisation et le contrôle des dites élections, et seraient par conséquent tentées de les fausser à leur seul profit.

En raison de la volonté, désormais manifeste, de Mamadi Doumbouya de se maintenir au pouvoir, la Charte de la transition est dès lors devenue encombrante aux yeux des autorités de la transition qui aimeraient qu’elle n'existât jamais, du moins qu'elle soit a minima extirpée des dispositions qui font obstacle à leurs volontés de se maintenir à la tête du pays.

Il reste que Mamadi Doumbouya a prêté serment devant la Cour suprême sur cette Charte à un moment où elle trouvait à s’appliquer pleinement. Qu’il a juré qu’« en cas de parjure, que je subisse les rigueurs de la loi » et qu'il a pris des engagements solennels à de nombreuses reprises pour réaffirmer ce serment.

Par conséquent, tout acte de candidature de Mamadi Doumbouya ou des autres responsables des organes de la transition doit être interprété comme un parjure, puni d’une peine de plusieurs années d'emprisonnement dans de nombreux pays.

B. Le CNT et la quête du costume juridique pour contourner le parjure

C’est dans ce sens que le Conseil national de transition (CNT), constituant de circonstance de cette période transitoire, s’est attaché, dans le processus d’élaboration du projet de Constitution, à trouver des solutions pour surmonter les difficultés posées par la Charte de la transition. Il a semblé y parvenir en ignorant volontairement ces 3 articles précités de la Charte, alors même qu’ils représentaient des éléments structurants du « pacte de transition » entre les autorités transitoires et le peuple de Guinée. Nul besoin de mentionner que ces articles ne pouvaient faire l'objet de révision.

Le président du CNT, Dr Dansa Kourouma a expliqué l’absence de la prise en compte de ces dispositions de la Charte par la nécessité de ne pas personnaliser ce projet de texte fondamental. Il faut le dire clairement qu’il s'agit là d’un argument de mauvaise foi dans la mesure où des techniques de légistique permettent d’y parvenir sans aucune personnalisation. Il aurait par exemple suffi d’écrire dans une partie du projet de constitution consacrée aux dispositions transitoires : “Les articles 46, 55 et 65 de la Charte de la transition de 2021 font partie intégrante de la présente Constitution” pour satisfaire cette exigence sans avoir besoin de mentionner nominativement les personnes concernées.

Le grand espoir de ceux qui souhaitent réaliser le blanchiment du coup d’État du 5 septembre serait donc que l’expression de la souveraineté qui résulterait du vote du peuple le 21 septembre prochain par l’adoption de ce projet de Constitution par référendum tourne non seulement la page de la Charte de la transition, mais absout du même coup tous les péchés mignons liés au serment et aux nombreux engagements solennels de Mamadi que « ni lui ni aucun autre membre des organes de la transition ne fera acte de candidature aux élections de fin de transition ».

II. Le préambule du projet de Constitution renforce la valeur juridique de l’inéligibilité de Mamadi Doumbouya

A. La pédagogie tirée de la jurisprudence de 1971 du juge constitutionnel français

Pour mieux comprendre le raisonnement juridique qui démontre cette inéligibilité des autorités de transition, il est nécessaire de comprendre la décision fondatrice du conseil constitutionnel français, n° 71-44 DC du 16 juillet 1971, dite décision « Liberté d’association », qui confère pleine valeur juridique au préambule de la Constitution de la Vème République de la France.

Le juge français a en effet annulé une disposition législative en se fondant sur le premier alinéa du Préambule de la Constitution du 4 octobre 1958 qui indique : « Le peuple français proclame solennellement son attachement aux Droits de l’homme et aux principes de la souveraineté nationale tels qu’ils ont été définis par la Déclaration de 1789, confirmée et complétée par le préambule de la Constitution de 1946 ». La référence à ces deux textes par le préambule de la Constitution a permis au conseil constitutionnel d’arriver à la conclusion que la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen (DDHC) de 1789 et le préambule de la Constitution de 1946 font partie intégrante de la Constitution française de la Vème République.

Ce qui institue de facto un bloc de Constitutionnalité composé de la Constitution de 1958 proprement dite, la DDHC de 1789, du préambule de la Constitution de 1946 (et les principes auxquels il fait référence) ainsi que la Charte de l’environnement de 2004, mentionné dans le préambule à la faveur de la révision constitutionnelle du 1er mars 2005. Ces textes sont donc des normes qui servent de référence aux juridictions françaises pour effectuer leurs contrôles de conformité à la Constitution de toutes les normes inférieures

B. L’inéligibilité renforcée de Mamadi Doumbouya

Il est possible de tirer un raisonnement juridique analogue sur le fondement des dispositions du préambule du projet de Constitution qui est soumis au référendum du 21 septembre prochain. Pour cause, ce préambule dispose :

« Nous peuple de Guinée » (alinéa 1er), « réaffirmons » (alinéa 7) :

1. « Notre adhésion aux libertés et droits fondamentaux de l’être humain, consacrés dans l’ensemble des instruments juridiques sous-régionaux, régionaux et internationaux ratifiés par la République de Guinée » (alinéa 8) ;
2. « Notre attachement aux processus d’intégration sous-régionale et régionale ainsi qu’à la réalisation de l’objectif de l’unité africaine » (alinéa 13).

L’alinéa in fine précise que « le préambule est partie intégrante » du projet de Constitution. Ainsi, à la différence de l’exemple français où c’est le juge qui a conféré valeur constitutionnelle au préambule, dans le cas de ce projet de Constitution, c’est le constituant lui-même qui se charge de consacrer la pleine et entière valeur constitutionnelle de ce préambule.

Il résulte de la combinaison de ces dispositions du préambule que l’ensemble des traités et accords internationaux ainsi que les différents textes se rapportant à la CEDEAO et à l’Union africaine ratifiés par la Guinée, en lien avec les libertés et droits de l’homme et les processus d’intégration africaine, sont partie intégrante de ce projet de Constitution.

Le Constituant souhaite ainsi ériger, si ce projet de constitution venait à être adopté, un bloc de constitutionnalité composé d’un ensemble important de textes.

Or, parmi ces nombreux textes auxquels il est reconnu pleine valeur constitutionnelle, par le recours à cette technique du renvoi, se trouve la Charte africaine de la démocratie, des élections et de la gouvernance du 30 janvier 2007. Ce traité a été signé par la République de Guinée le 15 janvier 2008 et ratifié le 6 septembre 2010 la rendant pleinement exécutoire dans notre pays.

Cette Charte africaine se fixe pour objectif notamment de « promouvoir l’adhésion de chaque État partie aux valeurs et principes universels de la démocratie et le respect des droits de l’homme » (article 2, alinéa 1), confirmé au premier alinéa de l’article 3 en ces termes : « le respect des droits de l’homme et des principes démocratiques » comme l’un de ses principes. Il en résulte que cette Charte africaine de la démocratie fait partie des textes que le Constituant a souhaité intégrer dans le préambule de ce projet de Constitution.

Plus fondamentalement, l’article 25, alinéa 4 de ladite Charte stipule que « les auteurs de changement anticonstitutionnel de gouvernement ne doivent ni participer aux élections organisées pour la restitution de l’ordre démocratique, ni occuper des postes de responsabilité dans les institutions politiques de leur État ».

Il suit de là que, en intégrant cette Charte africaine de la démocratie au projet de Constitution, même involontairement, le Constituant a entendu réaffirmer l’empêchement légal, de toutes les autorités de la transition et Mamadi Doumbouya en particulier, en leur qualité d’auteurs de changement anticonstitutionnel (coup d’État), de faire acte de candidature aux élections marquant la fin de la transition.

Il faut rappeler que ces restrictions d’éligibilité posées par la Charte africaine pour la démocratie se cumulaient préalablement avec celles posées par la Charte de la transition avant que cette première ne fasse l’objet de consécration par ce projet de Constitution.

Le contournement des dispositions de la Charte de la transition par le refus de leur intégration dans le projet de Constitution ne lève donc pas l’inéligibilité des autorités de la transition. Elle se trouverait au contraire portée au sommet de la hiérarchie des normes juridiques de notre pays avec l’adoption de ce projet de Constitution. Ce cadre juridique fera donc partie des points à examiner par l’organe de gestion des élections pour apprécier l’éligibilité des futurs candidats à l’élection présidentielle. Le juge des élections devra aussi s’y référer en cas de contentieux.

Pourtant, il n’existe que peu de doutes que Mamadi Doumbouya, avec la complicité de l’élite dirigeante de notre pays qui tire profit de son maintien au pouvoir, n’aura aucun mal à se porter candidat aux prochaines échéances électorales. Mais comme toujours, c’est le déficit d’application des textes existants qui lui permettra d’y parvenir et non une absence de texte.

Oui, il est plus qu’illusoire de penser qu’un juge Guinéen, nommé pour partie par décret d’un président (premier alinéa de l’article 146 du projet de Constitution), aura le courage de signifier à celui-ci son inéligibilité. C’est cette même illusion qui nous prend à rêver du temps où les juges sénégalais transmettraient leur audace à leurs homologues de Conakry dans la sauvegarde de l'intérêt supérieur de la Nation et la défense impartiale de la patrie.

Guillaume BANGOURA
Coordinateur provisoire
Espoir et Actions pour la Guinée.

 

 
Dépêches
Express radio

Archives

REGIONS

Guinée: la CRIEF condamne un proche d'Alpha à cinq ans de prison et ordonne la confiscation de tous ses biens

Dissolution des Conseils Communaux : les Forces Vives de Guinée protestent (communiqué)

Maison Centrale de Conakry: le ministre Charles Wright prend des mesures draconiennes

Guinée : La Fondation KPC pour l’Humanitaire signe un Protocole d’Accord avec la famille Ilaix Moriba

Secteur énergétique : le bilan du Professeur Alpha CONDE est élogieux (Par Sayon MARA)

Université de Kankan: des étudiants en colère, cassent tout sur leur passage

Kindia: Le Premier Ministre reçoit une mission du fonds saoudien de développement !

Kindia: le colonel Mamadi Doumbouya prend le poule des troupes

Kindia : La session extraordinaire du conseil interministériel consacrée à la sécurité routière en Guinée

11 morts dans l'accident impliquant le cortège du ministre de la Sécurité à Kolabounyi : le parquet général ouvre une enquête !

Bannière