3/6/2025
La pénurie de liquidités en Guinée s’aggrave dangereusement. Le secteur bancaire est paralysé : les banques primaires ne parviennent plus à servir leurs clients, alors que la fin du mois et les préparatifs de la fête de Tabaski approchent.
Le manque de cash se généralise dans tout le pays. Même les cambistes, habituellement capables de proposer des solutions alternatives, sont à court de liquidités.
Pire encore, les banques primaires et les institutions de microfinance ne peuvent plus s’approvisionner auprès de la Banque centrale. Cette dernière, elle-même à sec, n’est plus en mesure de fournir les fonds nécessaires.
La crise s’intensifie, avec des répercussions très concrètes sur la vie des populations.
Témoignages d’acteurs du secteur et de simples clients font état d’un profond désarroi.
Certains fonctionnaires attendent toujours leur paie de la BCRG (Banque centrale de la République de Guinée). Les clients des banques, eux aussi, se retrouvent bloqués.
La BCRG, empêtrée dans des scandales et une gestion chaotique, se distingue par son silence et son absence de solutions.
Face à cette situation critique, c’est désormais le système D qui prévaut. Des réunions de crise se tiennent quotidiennement dans les banques, tandis que la grogne des clients ne cesse de monter. Les salaires de certaines entreprises sont bloqués depuis plusieurs jours, faute de liquidités. Les pensions des retraités de la CNSS ne sont pas versées non plus.
La Banque centrale, pourtant au cœur de ce dispositif, reste muette, alors que la crise pourrait durer encore longtemps : aucune solution concrète n’est envisagée.
Des rumeurs évoquent des arrivées de liquidités par avion cargo, mais là encore, aucune annonce officielle n’est faite par les autorités monétaires, trop occupées à gérer d’autres urgences.
Le paiement de certains chèques devient difficile, alors que plusieurs banques limitent les retraits entre 5 et 10 millions de francs guinéens. Cette mesure, appliquée sans communication claire, suscite l’inquiétude des clients.
Dans les zones minières de Haute-Guinée et de Guinée forestière, la situation est particulièrement tendue. De nombreux travailleurs attendent toujours le paiement de leurs salaires de fin de mois. À l’approche des fêtes, ce retard alimente la frustration et fait craindre des mouvements de protestation voire des émeutes.
Les zones de Conakry, Kankan et Siguiri sont particulièrement touchées par cette crise inédite depuis l’indépendance du pays.
Pour couronner le tout, le gouvernement ne dispose plus des fonds nécessaires pour payer les fonctionnaires.
Les banques primaires ont déjà avancé les salaires des mois d’avril et de mai, comme si le pays était en faillite. Mais pour combien de temps encore ? La grande question reste : les banques pourront-elles payer les salaires de juin, si l’État ne les rembourse pas d’ici là ?
Abdoul latif Diallo
Journaliste d’investigation
Très très indépendant |